Nous avons vu comment aborder le texte en définissant quel peut être l’horizon d’attente qu’il programme et les mouvements qui le composent. Nous avons également travaillé sur l’élaboration d’un projet de lecture, qui servira de fil rouge au commentaire littéraire, et duquel découle un plan.

Voici ce dont sera nourri le développement, et comment on peut efficacement organiser son brouillon pour une rédaction efficace et convaincante.

Mise à jour : dimanche 16 décembre


Comment organiser votre brouillon ?

Quelques rappels

Vous vous en rappelez, la structure du commentaire est la même que celle de la dissertation :

  • introduction,
  • développement en deux à trois parties, comprenant chacune deux à trois sous-parties,
  • conclusion.

Dans le développement du commentaire littéraire, chaque sous-partie développe un ou plusieurs éléments d’interprétation, liés au projet de lecture retenu, en proposant des analyses du texte, et en le citant.

Exemple de commentaire

Par exemple, nous pourrions commenter un extrait de l’Acte I, scène 1 de Phèdre, du vers 29 au vers 68.

Notre projet de lecture pourrait être :

Nous verrons en quoi, dans cet extrait de scène d’exposition, s’exprime de façon difficile et douloureux l’amour interdit que porte Hippolyte à Aricie, ce qui d’emblée place le héros sous le signe du tragique.

La seconde partie de notre commentaire pourrait s’attacher à l’aveu proprement dit.

Plan du commentaire

I. C’est une scène d’exposition…
II. Au cours de laquelle Hippolyte avoue un amour douloureux et interdit.
III. Cet aveu et son désir de fuite placent d’emblée le héros sous le signe du tragique.

Une sous-partie du II porterait sur la difficulté à formuler cet amour.

Plan de la seconde partie

1. Théramène pousse Hippolyte dans ses retranchements.
2. Ce dernier révèle alors son amour pour Aricie avec difficulté.

L’un des vers que l’on étudierait alors de près est le vers 56, dans la seconde sous-partie.

“Si je la haïssais, je ne la fuirais pas.”


Il faudrait interpréter ce vers (lui donner sens), en l’analysant (en observant comment il est écrit), et bien sûr en le citant. Au fond, cela reste une démarche argumentative : on défend son interprétation de l’œuvre grâce à des analyses précises. C’est pourquoi on conseille parfois d’organiser son brouillon, pour ce qui est des différentes parties et sous-parties, en un tableau de trois colonnes, comme suit.

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Le tableau en trois colonnes permet de mettre les informations au fur et à mesure qu’on les trouve ; on peut trouver l’interprétation en premier, ou l’analyse auparavant : peu importe, l’organisation générale nous permettra par la suite de rédiger de façon claire et cohérente une sous-partie de commentaire :

Hippolyte éprouve les plus grandes difficultés à reconnaître son amour pour Aricie. Il a du mal à s’exprimer, comme en témoigne sa brève réplique, encadrée par les questions de Théramène : “Si je la haïssais, je ne la fuirais pas” (v. 56). C’est aussi ce que souligne la reprise du verbe “haïr”, prononcé par son serviteur au vers précédent (“Et devez-vous haïr ses innocents appas”, v. 55), comme s’il peinait à trouver ses mots. Il semble vivement répugner à avouer son amour, que dissimule et révèle à la fois l’euphémisme qu’il emploie, sur le mode de l’hypothèse : “Si je la haïssais…”. Cette phrase est moins un aveu, au fond, qu’un constat sur sa propre conduite, comme s’il se regardait agir, et analysait sa fuite avec une lucidité incomplète, puisqu’il n’explicite pas ses sentiments.


Extraits de Phèdre sur lesquels s’exercer

Que peut-on analyser ?

  • C’est du théâtre : il faut observer comment se répartissent et s’organisent les répliques.
  • C’est une tragédie : on peut s’attendre à de violents conflits entre les personnages, à l’expression de la fatalité (registre tragique), de la souffrance (registre pathétique)… On regardera le vocabulaire et la ponctuation notamment.
  • C’est une tragédie classique, en vers : comme dans un poème, on observera comment le travail de versification, le rythme, les sonorités, les images contribuent au sens du texte.

Acte I, scène 1 : la tirade d’Hippolyte à l’attention de Théramène

Tu sais combien mon âme, attentive à ta voix,
S’échauffait aux récits de ses nobles exploits,
Quand tu me dépeignais ce héros intrépide
Consolant les mortels de l’absence d’Alcide,
Les monstres étouffés, et les brigands punis,
Procuste, Cercyon, et Sciron, et Sinis,
Et les os dispersés du géant d’Épidaure,
Et la Crète fumant du sang du Minotaure.
Mais quand tu récitais des faits moins glorieux,
Sa foi partout offerte, et reçue en cent lieux ;
Hélène à ses parents dans Sparte dérobée ;
Salamine témoin des pleurs de Péribée ;
Tant d’autres, dont les noms lui sont même échappés,
Trop crédules esprits que sa flamme a trompés !
Ariane aux rochers contant ses injustices ;
Phèdre enlevée enfin sous de meilleurs auspices ;
Tu sais comme, à regret écoutant ce discours,
Je te pressais souvent d’en abréger le cours.


Phèdre à Œnone, Acte I, scène 3.

Je le vis, je rougis, je pâlis à sa vue.


Phèdre à Hippolyte, Acte II, scène 5.

Venge-toi, punis-moi d’un odieux amour.
Digne fils du héros qui t’a donné le jour,
Délivre l’univers d’un monstre qui t’irrite.
La veuve de Thésée ose aimer Hippolyte ?
Crois-moi, ce monstre affreux ne doit point t’échapper.
Voilà mon cœur. C’est là que ta main doit frapper.


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