Comme le voyageur de Friedrich, prenons de la hauteur et tentons de mesurer ce que nous avons découvert quant au rapport que les artistes romantiques - les poètes au premier chef - entretiennent avec le monde : voix engagées dans les luttes du XIXe siècle, qui se veulent des guides pour les hommes, et qui saisissent et interrogent aussi l’humanité à travers soi, dans l’introspection que permet la contemplation solitaire d’un paysage ; voix qui résonnent au cœur de la cité, “dans le grand désert d’hommes”, ou dans le refuge sacré de la nature… (je vous renvoie à “Fonction du poète” et à “L’enfant” de Hugo, notamment).

Voix dont les mots cherchent aussi, on l’a vu, à réparer, à consoler, à dire la perte… ce que Lamartine fait emblématiquement dans son célèbre poème “Le Lac”.


Extrait du “Lac” de Lamartine

Un soir, t’en souvient-il ? nous voguions en silence ;
On n’entendait au loin, sur l’onde et sous les cieux,
Que le bruit des rameurs qui frappaient en cadence
Tes flots harmonieux.

Tout à coup des accents inconnus à la terre
Du rivage charmé frappèrent les échos ;
Le flot fut attentif, et la voix qui m’est chère
Laissa tomber ces mots :

« Ô temps ! suspends ton vol, et vous, heures propices !
Suspendez votre cours :
Laissez-nous savourer les rapides délices
Des plus beaux de nos jours !

(…)  »

Extrait des Méditations poétiques, 1820.


Lamartine et le lyrisme romantique

“Je suis le premier qui ait fait descendre la poésie du Parnasse, et qui ait donné à ce qu’on nommait la Muse, au lieu d’une lyre à sept cordes de convention, les fibres mêmes du cœur de l’homme, touchées et émues par les innombrables frissons de l’âme et de la nature.”

Lamartine, préface aux Méditations poétiques, 1849 (première édition : 1820)

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